Discours du vendredi 11.07.2025 : « L’entrée du Prophète Mohammed ﷺ à Yathrib (Médine) après la Hijra »
Ô serviteur d’Allah : l’entrée du Messager d’Allah ﷺ dans la ville illuminée (Al-Madina Al-Munawwara) revêt une signification profonde et cruciale. Comme les Ansar (habitants de Médine qui ont soutenu le Prophète) l’ont clairement exprimé, elle signifiait une rupture totale avec les tribus arabes et un état de conflit permanent avec certains groupes résidant à Médine. Elle représentait un sacrifice, un don de soi, une dépense dans le sentier d’Allah et l’acceptation de la mort pour Sa cause.
Les Ansar connaissaient parfaitement ces implications avant même que le Prophète ﷺ n’entre dans leur ville. Par leur attachement fervent à la vérité, leur soutien actif à ses défenseurs et leur protection du message divin, ils firent au Prophète ﷺ une promesse solennelle :
- Dépenser pour la cause, en période d’aisance comme dans l’adversité.
- Obéir dans l’effort comme dans l’épreuve ou l’épuisement.
- Ordonner le bien et interdire le mal.
- Défendre la vérité sans craindre les reproches.
- Le protéger comme ils protégeraient leurs propres familles.
Tout ceci en échange du Paradis.
Il est impensable qu’un individu fasse de tels sacrifices sans être absolument convaincu qu’il n’y a de divinité qu’Allah, que Mohammed est Son Messager, que le Paradis est une réalité et qu’il y accédera grâce à ses actes. Le Prophète ﷺ a ainsi loué les Ansar en disant : « Le signe de la foi est l’amour pour les Ansar, et le signe de l’hypocrisie est la haine envers eux. » (Boukhari). Imaginez : aimer les Ansar est une marque de foi, tandis que les détester révèle l’hypocrisie. Leur statut est tel que la foi d’une personne se mesure à son amour envers eux.
Un accueil héroïque et un engagement inébranlable
Les Ansar accueillirent le Prophète ﷺ avec une immense joie, parfaitement conscients des défis à venir avec l’arrivée des Muhajiroun (émigrés de La Mecque). Malgré la difficulté évidente du chemin, ils avaient la certitude que son aboutissement serait le Paradis. Leur joie était sincère et proactive : dès le premier jour, ils accueillirent le Prophète ﷺ en armes, symbole de leur honneur et de leur fidélité au pacte conclu lors d’Al-Aqaba.
La première leçon : autosuffisance et fraternité
Serviteur d’Allah : La première leçon donnée par le Prophète ﷺ aux Médinois fut celle de l’autonomie financière, bien qu’il eût le droit légitime de profiter de leurs biens. Lorsqu’il voulut construire la mosquée, il proposa d’acheter le terrain aux Banu An-Najjar. Ceux-ci répondirent : « Non, par Allah ! Nous ne demandons aucun prix, mais uniquement la récompense divine. » (Boukhari). Lorsque la mosquée devint trop petite, elle fut agrandie, et Othman ibn Affan (رضي الله عنه) acheta la parcelle nécessaire.
La fraternité entre Muhajiroun et Ansar
Quand Abdou Rahman ibn Awf (رضي الله عنه) arriva à Médine, le Prophète ﷺ instaura entre lui et Saad ibn Ar-Rabi’ une fraternité exemplaire. Saad, homme aisé, lui proposa : « Je partage avec toi ma fortune et te marie à une femme d’ici. » Mais Abdou Rahman déclina poliment et préféra commercer au marché, obtenant rapidement son indépendance financière. Plus tard, marié à une Ansarite, le Prophète ﷺ lui dit : « Organise un repas de mariage, même si c’est avec un mouton. » (Boukhari)
Serviteur d’Allah : dès son arrivée, le Prophète ﷺ analysa soigneusement la situation à Médine:
- Qui y vivait ?
- Qui étaient les alliés et les ennemis potentiels ?
- Comment gérer les différentes communautés (juives, polythéistes, hypocrites) ?
Il établit ainsi un pacte constitutionnel, la « Constitution de Médine », définissant clairement les droits et devoirs de chacun. Le pacte se concluait par ces mots : « Allah est le garant de la sincérité de ce traité. Ce pacte ne protège ni l’injuste ni le pécheur. Celui qui reste à Médine pacifiquement sera en sécurité, sauf les oppresseurs. Allah protège ceux qui Le craignent et suivent le droit chemin, et Mohammed est Son Messager. »
Les épreuves et la patience des Muhajiroun
Après l’installation du Prophète ﷺ, plusieurs émigrés tombèrent malades en raison du climat inhabituel de Médine. Cette situation difficile pouvait affaiblir le moral et réjouir leurs ennemis. Le Prophète ﷺ déclara pour les encourager : « Quiconque de ma communauté supportera patiemment les épreuves et difficultés de Médine, je serai son intercesseur et témoin le Jour de la Résurrection. » (Muslim)
Ainsi, il rassura ses compagnons, leur indiquant que cette épreuve serait suivie d’une grâce divine, transformant Médine en un lieu béni pour les pieux. Il invoqua Allah : « Ô Allah, fais-nous aimer Médine autant, voire plus, que nous aimons La Mecque. Ô Allah, bénis nos mesures, purifie cette ville pour nous, et transfère sa fièvre à Al-Juhfa. » (Muslim) Et aussi : « Ô Allah, accorde à Médine le double des bénédictions accordées à La Mecque. » (Boukhari) Grâce à cette fermeté, ces invocations et ces bénédictions, le moral s’améliora, et la société médinoise s’unit progressivement, affrontant avec succès les défis jusqu’au triomphe final.
Serviteur d’Allah : À peine trois ans avant l’Hégire, se déroulait ce que l’on appelle l’« Année de la Tristesse » : Abou Talib, le protecteur du Prophète ﷺ, et son épouse bien-aimée Khadija (qu’Allah l’agrée), quittèrent ce monde. La Mecque sombra dans l’obscurité, la prédication fut pratiquement étouffée, et la porte de l’appel à l’islam sembla se refermer. Face à ce rejet, le Prophète ﷺ quitta La Mecque à pied, porteur du message divin, en quête de cœurs réceptifs ailleurs.
Il se rendit à Taïf, empruntant un chemin long et éprouvant. Vous connaissez tous les événements douloureux qui s’y déroulèrent : il y fut agressé, couvert de poussière, et insulté de manière ignoble. À son retour, il ne put réintégrer La Mecque qu’avec la protection d’un polythéiste, Al-Mut’am ibn ‘Adiy.
La Mecque avait rejeté l’islam. Taïf aussi. Et durant les dixième et onzième années de la mission prophétique, toutes les tribus invitées à embrasser l’islam repoussèrent l’appel. Seuls six hommes du clan des Khazraj, venus de l’extérieur de La Mecque à la fin de la onzième année, crurent au message. C’était à peine deux ans avant l’Hégire.
Et pourtant, en seulement deux ans, le Prophète ﷺ devint à Médine le guide d’une cité, modeste certes, mais dotée d’un véritable État. Il était désormais écouté, respecté et obéi.
Un tel bouleversement aurait paru inconcevable à tout observateur de l’époque. D’un point de vue purement humain ou matériel, il était inimaginable que des croyants persécutés, exilés et sans ressources puissent, en si peu de temps, établir une communauté forte, unie et victorieuse. Et pourtant, par la volonté d’Allah, l’impossible devint réalité.
Que la paix et les bénédictions d’Allah soient sur notre Prophète Mohammed, sa famille et ses compagnons.